Les ennuis de santé d’Antoine, mon mari, ont commencé en 2007.
Il doit subir une dyalise 3 fois par semaine, il ne peut plus avoir une vie normale, ni aller travailler. Notre famille vit au rythme de la maladie qui impacte notre quotidien : les repas, les sorties, tout devient compliqué.

Lorsque que je me suis interrogée sur la possibilité de donner un rein à mon mari, j’ai été étonnée du manque d’information que pouvait nous fournir notre médecin de ville. C’est à l’hôpital que nous avons finalement pu obtenir toutes les informations nécessaires à cette démarche.*Il faut tout d’abord savoir si l’on est compatible grâce à une première prise de sang.
Nous sommes en septembre 2009 et le résultat n’arrivera que dans un mois… ouf, c’est positif !

En janvier 2010, je rentre à l’hôpital afin de savoir si mon état de santé me permet de donner un rein. Quatre longs jours d’examens durant lesquels je commence à craindre que l’on trouve une maladie sur moi, aussi…
Le jeudi soir, la néphrologue me convie à un compte rendu médical complet. J’ai souhaité y assister entourée de mes enfants, afin qu’ils puissent entendre avec moi la conclusion, poser toutes les questions qu’ils veulent et être rassurés par cette double intervention.
Selon la néphrologue, techniquement tout semble correct : je peux donner !

Il a alors fallu que je prenne ma décision. J’ai dû affronter mes doutes et mes craintes, car j’ai toujours éprouvé de la méfiance envers milieu hospitalier. J’avais peur de l’opération, peur du réveil. Je pensais à mes enfants et à ma propre santé… « Quels sont pour moi les risques de ce don ? »
En février, j’ai demandé à rencontrer une personne qui a donné un rein à son fils. Cet échange a été bref, mais très réconfortant. Ma décision était prise : c’est oui !

La date choisie, la procédure administrative m’amène alors devant un groupe de 5 experts médicaux qui m’interrogent sur ma motivation. Je me souviens leur avoir dit : « Savez-vous ce que c’est de vivre avec un malade ? Moi, je ne vis plus. » Puis, me voilà devant le tribunal pour vérifier que je suis libre et consentante pour ce don. Un entretien plutôt froid et impersonnel, mais nécessaire pour valider un choix loin d’être le plus anodin !

C’est la fin d’un long parcours qui aura duré 6 mois. L’opération est dans 4 jours.Il faut savoir que, jusqu’au jour de la greffe, on peut renoncer à donner. Les différents interlocuteurs ne manquent pas de nous le rappeler jusqu’aux portes du bloc opératoire ! 

Le 17 mars 2010, je me réveille sur le lit d’hôpital. Tout s’est bien passé, j’aperçois ma famille et leur adresse le « V » de la victoire. Je viens de donner un rein à mon mari, alors quelques mois auparavant, je ne savais même pas que je pouvais être donneuse d’organes de mon vivant.

Avec Antoine, aujourd’hui nous pouvons faire des projets et envisager l’avenir.
Je ne me sens pas une personne exceptionnelle, juste quelqu’un qui voulait retrouver une vie normale.
En 2010, cette année-là, j’ai fait partie des 281 personnes à avoir donné un rein de leur vivant à un proche.